Jean-philippe Gams / WuGong / 2021 / July
Interview de Maître Ma ChuanXu
Ecrit par Jarek Svymanski. chinafrominside interview en anglais Traduit par Jean-philippe Gams - ZhangFei
JS : Mr Ma, vous êtes très connus dans le milieu martial de Pékin, mais il est impossible de vous voir lors de rencontre ou de compétition de BaGua …
Ma : Je travaillais pour le bureau de sécurité publique depuis 1978 et j’enseignais aux forces spéciales. Le titre de mon poste officiel était : « Entraîneur général des arts martiaux du bureau municipal de la sécurité publique de Pékin ». Pour cette raison, il m’était impossible de prendre part aux manifestations publiques, ce qui incluait les rencontres de BaGua, ainsi que d’avoir des contacts avec les étrangers.
JS : En tant qu’étranger, il m’aurait été impossible de vous rendre visite avant ?
Ma : Oui, cela était impossible avant ma retraite, il n’y a pas de problème maintenant. J’ai pris ma retraite en 1993.
JS : Vous êtes très célèbre pour vos qualités de combattant. Ce n’est pas très courant de nos jours que les pratiquants d’arts internes sachant efficacement se battre. Quand avez-vous commencé votre pratique martiale ?
MA : J’ai commencé à apprendre les AM à l’âge de 9 ans. Ma famille pratiquait la boxe de shaolin depuis plusieurs générations et cela a été mon premier style. Dans mon village, il y avait deux styles très populaires : le Shaolin et le Da Hong Quan, mais la plupart pratiquaient le Shaolin. Je ne peux vous dire de quelle branche il s’agissait car personne n’attachait d’importance aux noms à cette époque. Notre village était très grand et il y avait un temple bouddhiste. Mon grand père apprit avec un moine qui vivait au temple. J’ai appris avec mon père et ce qu’il m’a enseigné n’était pas les formes mais les bases de la boxe Shaolin, surtout les assouplissements et les coups de pieds. C’était un professeur très strict, il me frappait souvent avec un bâton lorsque je ne pratiquais pas sérieusement. Je devais faire des coups de pied de face avec la jambe tendue afin que mes doigts de pied touchent mon nez ou mon menton. Dans ma trentaine, je pouvais encore passer sous un banc en bois d’un côté à l’autre en utilisant Pu Bu très rapidement. Le banc était tellement bas que mon torse devait toucher le sol pendant le mouvement. Il y avait beaucoup d’exercices que nous devions pratiquer, tels que courir sur le mur (Pao Qiang) …
JS : Comment pratiquiez-vous cela ?
Ma : Premièrement vous mettez une planche de bois contre le mur à un angle faible entre la planche et le sol. Ensuite, vous courrez sur la planche, vers le mur et vous revenez. Votre corps doit rester vertical par rapport au sol. Petit a petit l’angle augmente jusqu’à ce que finalement on enlève la planche pour courir directement sur le mur. Le résultat est que vos doigts de pied touchent votre tibia.
JS : Vous avez atteint un certain niveau en Shaolin. Pourquoi ne pas avoir continué et avoir choisit d’apprendre le BaGua à la place ?
MA : Parce que mon père, qui m’enseignait la boxe de Shaolin, m’a dit que le BaGua était un art martial extrêmement efficace, très exigeant pour les jambes, mais différent des bases du Shaolin. Il m’a dit que ce qui pouvait être atteint par la pratique du Shaolin pouvait aussi être atteint par la pratique du bagua, mais que certaines qualités ne pouvaient êtres atteintes uniquement grâce au BaGua et non au Shaolin. Mon père m’a aussi dit que le BaGua était un art martial de niveau supérieur par rapport au Shaolin et que c’était le plus haut niveau d’art martial parmi tous les styles : le XingYi développe la force ferme, le TaiJi Quan la force qui « colle », alors que le BaGua développe la force intelligente (XingYi Wei Cui, TaiJi Wei Nian, BaGua WeiQiao). Les meilleures méthodes et techniques de tous les styles ont été synthétisés dans le BaGua.
JS : Qu’est ce que cela veut dire que le BaGua utilise la force intelligente ?
MA : La force intelligente s’exprime en BaGua par ses techniques et sa stratégie, c’est comme aller quelque part – prendre un chemin plus ou moins long. Dans les styles externes, on prend un long chemin, alors que le BaGua choisit le chemin le plus court vers l’efficacité en combat, basé sur les qualités internes.
JS : Quand êtes-vous devenu l’élève de Li Zi Ming ?
MA : Cela c’est fait par coïncidence. Quand j’ai appris qu’un collègue de l’usine où je travaillais était l’élève de LiZiMing et pratiquait le BaGua, je lui ai demandé de m’amener au parc où ils pratiquaient. Puisque j’avais déjà des qualités et que ma taille et mes jambes étaient très souples, Li ZiMing m’a tout de suite bien aimé et a accepté de me prendre comme élève.
JS : Quand avez vous commencé à apprendre avec LiZiMing ?
Ma : en 1961
Js : Quand êtes-vous devenu son Disciple ?
MA : En 1976. Car LZM n’acceptait pas de disciple lorsque Guo Gumin était vivant, et puis il y a eu la révolution culturelle (1966-1976). En fait nous étions plus comme des amis avec M. Li. Ses enfants m’appelaient « oncle ». J’ai aussi appris beaucoup de techniques ainsi que méthodes d’entraînement avec Guo Gumin.
JS : Est ce que M. LI a appris beaucoup de Guo GuMin ?
MA : Oui c’est vrai. Ils étaient frères d’arme (disciple du même maître – Liang ZhengPu).
Mais Guo était un enseignant d’art martiaux professionnel. M. Li était plus jeune que Guo et très occupé à gérer son affaire. Il était propriétaire (avant 1949) de la plus grosse usine de sauce de soja de Pékin. M. Li était aussi engagé, en travail underground, et a couvert beaucoup de communistes officiels, notamment Wan Li et Liu Ren, qui sont devenus, vice maire après 1945. Après la libération, LZM occupait d’importants postes – directeur de l ‘usine « foodstuff » et d’une brasserie de bière. Et avant la révolution culturelle il a été promu à la position de contrôleur au premier bureau d’industrie légère de pékin.
JS : que c’est-il passé pendant la révolution culturelle ?
MA : Bien sur il a subi des attaques, et a été obligé de démissionner de tous ses postes et a été persécuté.
Js : Pratiquiez-vous pendant la révolution culturelle ?
Ma : Je suis le seul à avoir continué les études du BaGua avec M. Li durant cette période. Nous étions six ou sept à apprendre au début des années 60, mais ils ont tous abandonné plus tard et je fus le seul à continuer.
JS : Donc vous êtes devenu le disciple de Li ZiMing en 1976 ?
MA : Oui en 1976 quand la révolution culturelle fut terminée. À cette période huit personnes furent acceptées par Li ZiMing comme disciple, incluant : Zhao DaYuan, Wang Tong, Sun HongYan, Ma Ling, Wang ShiTong, et Di GuoYong. Étant donné qu’à ce moment M. Li était déjà vieux et ne pratiquait plus beaucoup, s’intéressant plus à la peinture traditionnelle et la calligraphie, beaucoup d’entre eux ont appris avec moi.
Js : Beaucoup de gens disent que vous êtes très conservateur dans votre enseignement et très réticent à passer des méthodes de BaGua aux étudiants …
MA : J’attache beaucoup d’importance aux exercices basiques du BaGua. Ils sont très importants et si l’étudiant ne les pratique pas correctement, d’après mes exigences, alors c’est comme jeter tout ce que j’enseigne par la fenêtre. Ce n’est pas que je suis conservateur mais le problème est que beaucoup d’étudiants ne pratiquent pas assez dur et n’atteignent jamais un niveau satisfaisant avec les bases. Apprendre des techniques et des formes est sans valeur si les bases ne sont pas bonnes.
Js : comment peut-on développer les bases ?
MA : Il y a plusieurs méthodes : la plus basique est la marche en cercle. Elle est divisée en trois « bassin » (San Pan) : le bassin bas, le bassin du milieu, le bassin haut. Le concept du Yin Yang est aussi très important – c’est pourquoi on appelle souvent le BaGua « Yin Yang BaGua ». La marche dans le sens contraire des aiguilles d’une montre est « Yang » et dans les sens des aiguilles d’une montre est « Yin ». Il y a beaucoup d’exigences pour la marche en cercle : « vider » le torse et soulever le « bas » du dos (basculer le bassin vers l’avant) (Kong Xiong Ba Bei), « affaisser la taille » ( Xia Ta Yao), « pivoter » les hanches et garder les genoux ensemble (Niu Kua He Xi), agripper le sol fermement avec les doigts de pied ( Zhua Di Lao), laisser tomber les épaules et les coudes (Chui Jian Chen Zhou), lisser les fesses et soulever l’anus (Liu Tun Ti Gang), trois poussées ( la tête pousse, la langue pousse, les paumes poussent créant une énergie) et les trois principes du cercle. ( San Ding , Tou Ding, She Ding, Shou Ding, HunYuan Yi Qi – San Yuan). Seulement si tous ces principes sont strictement respectés alors le Nei Qi (l’énergie interne) apparaîtra et le Nei Gong se développera. Une fois que le Nei Gong se développe, c’est comme de l’électricité dans les mains.
JS : Que voulez-vous dire par « électricité dans les mains »
Ma : L’intention devient très importante, l’intention conduit le Qi et le Qi conduit la force (Yi Dai Qi Qi Dai Li). On doit développer le Qi du Dan Tian pour pouvoir l’utiliser et seulement à ce moment, on peut l’appeler Nei Gong.
JS : Donc qu’est ce que le Nei Gong ?
MA : Le Nei Gong c’est le Dan Tian. Vous devez atteindre un haut niveau dans la maîtrise de l’intention, et développer assez de Qi interne. C’est comme de l’électricité. Le Dan Tian, trois doigts sous le nombril, une fois développé est comme une balle de cuir. Le dan Tian devient l’endroit où tout le Qi interne se réunit c’est comme un champ électrique. Ensuite le Qi, qui est ressenti comme un courant de chaleur, circule depuis le point huiYin par les vertèbres lombaires, les vertèbres cervicales, Bai Hui (le sentiment de chaleur est extrêmement fort à ce point-là), le point Mu Quan, Tian Mo, Ren Tong. Le passage le plus difficile pour le Qi est entre le point Ren et Du, vous devez fermer la bouche et la langue doit toucher le palais supérieur, la respiration doit se faire par le nez (pas comme le style ChangQuan ou après certains exercices le pratiquant doit utiliser sa bouche pour reprendre sa respiration) alors le Qi retourne au Dan Tian et complète un cercle entier. La petite circulation céleste (xiao Zhou Tian)
Js : y a-t-il des sensations particulières quand la petite circulation céleste s’ouvre ?
Ma : bien sûr, une fois que la petite circulation céleste s’ouvre, beaucoup de salive apparaît dans la bouche et quand vous pratiquez, vous avez l’impression agréable comme en nageant.
Js : Avons nous besoin d’utiliser l’intention (Yi) afin de diriger la circulation du Qi ?
Ma : Non, vous ne devez pas penser au Qi lors de la pratique, la petite circulation céleste s’ouvrira naturellement, pas intentionnellement, quand votre Nei Gong aura atteint ce niveau. Mais votre pratique doit être supervisée par un professeur compétent.
JS : Est-ce suffisant d’ouvrir la petite circulation céleste ?
Ma : Non, vous devez ouvrir la grande circulation céleste pour que le Qi atteigne vos mains. Cela prend du temps et vous devez d’abord penser – utiliser l’intention ( Yi) - pour conduire le Qi jusqu’aux mains. Une fois que le Qi suit votre intention, la prochaine étape est d’être capable de faire circuler le Qi sans effort conscient. Le Qi se conduira comme du mercure. Quand vous frapperez avec la main cela proviendra immédiatement du Dan Tian, taille, pour atteindre la main. La main sera ressentie par l’attaquant comme très lourde. Seulement à ce moment, vous pouvez commencer à apprendre les techniques du BaGua et les mouvements.
JS : est ce que cela veut dire que tous les mouvements du BaGua ont été conçus de telle manière que l’on doive premièrement avoir le NeiGong afin d’être vraiment capable de les utiliser ?
Ma : Exactement. Sans NeiGong, toutes les techniques du BaGua sont inutiles et il ne sert à rien de les pratiquer. Pour cette raison, je ne suis pas disposé à enseigner les techniques aux étudiants n’ayant pas de qualité interne. C’est une perte de temps pour moi et eux.
JS : Je suppose que très peu de personnes peuvent apprendre de cette manière traditionnelle ?
MA : Oui, les pratiquants ont souvent le sentiment que la marche en cercle est un exercice ennuyant et ils abandonnent après un moment. Néanmoins, une fois que votre NeiGong se developpe, une fois que la petite circulation céleste s’ouvre, la pratique devient très intéressante.
JS : Est-ce que la boxe de Shaolin ont des méthodes similaires ?
Ma : Non ils n’en ont pas.
JS : Autant que je sache, les taoïstes suggèrent l’arrêt des rapports sexuels, car sinon la petite et la grande circulation céleste ne s’ouvriront jamais. Est-ce également vrai pour la pratique du NeiGong du BaGua ?
Ma : Oui, c’est une condition importante. Mon professeur m’a dit ça au tout début de ma pratique – si tu veux développer de vraies qualités, tu dois être comme un moine, vivre en célibat. Il y a une histoire à propos de « charbon » Ma, qui vendait du charbon à pékin a CaiShiKou. Quand il a commencé l’étude du BaGua de Dong HaiChuan, il a pris sa couverture et est parti vivre dans son petit magasin. Il a vécu là pendant trois ans et n’est jamais retourné chez lui, pas même une fois durant cette période.
Votre corps nécessite une semaine pour récupérer d’une relation sexuelle. C’est à dire la condition d’avant le rapport. 100 jours est nécessaire pour recouvrer le QI originel (Yuan QI) complètement (c’est-à-dire la condition avant d’avoir eut le premier rapport sexuel). Trois ans est nécessaire pour l’ouverture de la petite circulation céleste.
JS : Et pour les personnes mariés ? J’ai peur que les personnes ayant des familles aient des difficultés à développer des qualités internes alors…
Ma : Ce n’est pas un gros problème avec la pratique du bassin du milieu (Zhong Pan), vous pouvez quand même développer des qualités internes. Néanmoins une fois que vous décidez de pratiquer le bassin du bas (Xia Pan) vous devez arrêter tout rapport sexuel.
JS : Et si quelqu’un décide de pratiquer le bassin du bas sans se plier à cette règle ?
Ma : Vous allez alors vous blesser. Le bassin du bas est une pratique très exigeante pour le corps et il ne sera pas capable de le supporter. Pendant la pratique du bassin du bas, vous devez bien manger et vous reposer convenablement. C’est comme un compte bancaire. Si vous retirez 1 million de dollars de votre compte et ensuite remettez 1 million ce n’est pas un problème. Si vous transférez 1 million et un dollar vous aurez un peu d’économies – un surplus d’énergie. Par contre si vous remettez 990 mille vous serez alors en dette –, – votre corps ne sera pas capable de se remettre de ces efforts. Même si vos muscles deviennent plus fort, votre force interne, potentiel interne diminuera. Ce phénomène peut être reconnu en écoutant la voix d’une personne : une voix faible ni forte ni claire, parfois accompagnée de toux est un symptôme d’un niveau d’énergie faible. La méthode du Bassin du bas convient plus aux jeunes, célibataire. Sinon vous devez prendre la décision de devenir comme un moine pendant trois ans…
Js : nous avons parlé de la petite circulation céleste, et à propos de la grande circulation céleste (Da Zhou Tian) ?
Ma : une fois que la petite circulation céleste est ouverte, la grande s’ouvrira naturellement. Il y a un dicton « les petits accomplissements viennent en trois ans, les grands en dix ans » (XiaoCheng San Nian DaCheng Shi Nian). On doit vivre en célibat pour six ans afin atteindre la Vrai Qualité. Une fois que la Qualité arrive, vous devez continuer à limiter le nombre de vos rapports. Deux, trois fois par semaine vont ruiner totalement vos Qualités. Une fois tous le deux ou trois mois n’est pas un gros problème.
Js : Que voulez-vous dire par ruiner la Qualité ?
Ma : Vos jambes ainsi que votre taille (bas du dos) perdront toute flexibilité et force. Il y a beaucoup d’artiste martial qui avait des Qualités remarquables dans leur jeunesse mais qui, dans leur vieillesse, avait du mal à marcher. C’est dû à des rapports excessifs. Un de mes professeurs Guo GuMin ne s’est jamais marié. Quand j’ai commencé la pratique en 1961, pendant six ans, j’ai moi aussi vécu pratiquement en célibat. À 17 heures quand je rentrais du travail, je mangeais, et immédiatement je partais pratiquer. Je revenais à 1h du matin, après six ou sept heures de pratique. Tous les jours, sans un jour de repos.
JS : Mais, de cette manière, vous ne dormiez pas assez, vous n’aviez pas assez de repos.
Ma : La pratique correcte est meilleure que le sommeil. Quand vous pratiquez les arts internes cela nourrit votre corps.
Js : Vous avez presque 70 ans maintenant. Est-ce que vous pratiquez encore tous les jours ?
Ma : Je me lève tôt le matin et je pratique trois heures tous les jours. ( La femme de Ma ajoute qu’il pratique tous les jours peu importe le temps, même le jour du nouvel an chinois, la fête la plus importante en Chine).
Js : Dans les années 1960 est ce que vous pratiquiez d’autres exercices à part la marche en cercle ? De la méditation assise ou des postures (Zhang Zhuang) ?
Ma : La méditation assise ou debout est uniquement pour le développement du NeiGong. La marche, en cercle, est aussi appelée « Poteau qui bouge » (Huo Zhuang/ Xing Zhuang) et a beaucoup d’avantages –, – cela développe en même temps le WaiGong (pratique externe) et le NeiGong. Quand vous marchez, vous nourrissez votre QI interne à chaque minute, vous le rendez de plus en plus fort. C’est pourquoi la marche en cercle est tellement importante et difficile à comprendre.
Js : Avez vous aussi appris « La Légèreté » (Qing Gong) ?
Ma : La marche en cercle développe le Qing Gong. Quand vous avez atteint un certain niveau, vous avez la capacité de marcher sans toucher le sol.
Js : Comment cela est-il possible ?
Ma : L’idée est d’utiliser votre Dan Tian, taille, pour bouger. Je suis assis ici en ce moment. Si vous voulez m’attaquer, je peux bouger rapidement devant sans utiliser mes jambes, mais en contractant ma taille. ( Ma a fait une démonstration – depuis une position assise, il a été capable de bouger très rapidement de l’avant avant de toucher le sol avec ses jambes).
Js : Ca a l’air très mystérieux…
Ma : ce n’est pas mystérieux du tout, c’est juste une question de qualité, maîtrise, et de pratique.
Js : Comment est-ce que les gens vous ont connu ?
Ma : J’ai appris non pas seulement de Li ZiMing mais aussi de Han LanYu (expert en Wu Xing Chui, disciple de Bao Zhang), Guo GuMin (expert en BaGua, disciple de Liang ZhengPu), « TongBei » Li, Han QiChang (du Mei Hua Zhang). Mon professeur avait l’habitude de m’amener voir beaucoup d’autres maîtres et généralement je devais me battre avec leurs élèves. C’est comme ça que les gens ont commencé à me connaître…
Js : J’ai entendu dire que vous aviez aussi vaincu un artiste martial étranger relativement célèbre ?
Ma : Il y avait un étranger, qui avait un très bon XingYi. Il voulait étudier avec Li ZiMing et devenir son disciple. Beaucoup des étudiants de Li tels que Zhao DaYuan et Wang Tong étaient là. Ils ont tous croisé les mains avec l’étranger et ont perdu. Son XingYi était très impressionnant – quand il le démontrait, dans le mouvement d’ouverture toutes ses articulations craquaient. Ses Qualités externes étaient vraiment très bonnes, mais pas ses qualités internes. Il n’utilisait pas sa force correctement – il la gardait dans son corps, trop de tension dans ses muscles, il n’avait pas de racines.
Js : Vous voulez dire que l’on doit être relâché quand on pratique le BaGua ?
Ma : En BaGua il y a un dicton « marcher comme un singe, léger et « intelligent » (Qiao)…
Js : Intelligent ?
Ma : « se contracter (sur soi même), soyez doux comme du coton et intelligent » (Suo Xiao Mian Ruan Qiao) de sorte que vous pouvez rétrécir, contracter votre corps, sans avoir à utiliser de force, relâché, tel un ressort, qui peut être relâché à n’importe quel moment, mais seulement au contact de l’adversaire jamais avant. Essayer d’utiliser la force à distance n’est pas efficace.
Js : Est-ce que cela s’appelle « one inch power » (Cun Jin) ce dont vous parlez ?
Ma : Oui, dans les arts internes, nous frappons en utilisant cette force (one inch). Frapper à distance n’est pas efficace car cela ne fait pas vraiment mal à l’adversaire. Le pire qui puisse arriver est des bleus qui vont guérir après quelques jours. Quand je frappe mon adversaire, je veux qu’il crache du sang… c’est pourquoi nous mettons l’accent sur le NeiGong à ce point-là. Quand vous avez le NeiGong, si vous voulez faire mal à votre adversaire, vous le pouvez, si vous voulez le pousser dans les airs comme un ballon de cuir, vous le pouvez aussi.
Js : Avez vous déjà pratiqué des méthodes d’endurcissement ou de renforcement ?
Ma : Non, je n’en ai jamais pratiqué. Ces exercices développent la force externe, raide. Ce que nous voulons c’est le QI interne qui dirige tous les mouvements. C’est comme du mercure, une fois que vous frappez, c’est là, une fois que vous vous retirez, il se retire aussi. C’est flexible, vivant.
Js : À part les techniques de mains, on doit aussi maîtriser le jeu de jambes afin de les utiliser quand on frappe.
MA : Le QI arrive et la force (LI) arrive. Cela veut dire que nous devons pratiquer afin d’obtenir l’harmonie (He). Les mains, les yeux, le corps, et les jambes doivent se combiner en un (He).Une fois que nous frappons, ils arrivent tous en même temps, le corps devient Un, « la force coordonnée du corps » (Zheng Jin) est utilisée. Nous le développons par la pratique de la marche en cercle, techniques simples, et des formes. En TaiJiQuan il y a un dicton : « Quand l’adversaire ne bouge pas, je ne bouge pas non plus ; quand l’adversaire bouge, je bouge en premier » (Bi Bu Dong Wo Bu Dong ; Bi Yi Dong Wo Xian Dong). L’on doit atteindre l’harmonie de tout le corps afin qu’il se déplace comme Un pour bouger comme cela. C’est appelé la Vrai Harmonie.
Js : Il est facile de comprendre la première partie du dicton : « Quand l’adversaire ne bouge pas, je ne bouge pas non plus » mais pourriez-vous expliquer la deuxième partie ?
Ma : « Quand l’adversaire bouge, je bouge en premier ». Cela veut dire que quand l’adversaire décide de bouger, il y a un court moment lorsqu’il prépare son attaque. Vous devriez être capable de remarquer ce moment et frapper quand ce moment n’est pas encore terminé. Cela requiert un très bon NeiGong et de grandes Qualités – vitesse et timing.
Js : Certaines personnes disent que le BaGua n’est pas aussi fin, doux que le TaiJiQuan, que sa finesse est d’une qualité différente. Qu’en pensez-vous ? Devrions nous être complètement relâché quant à la marche en cercle ?
Ma : L’on doit être relâché (Song) mais en même temps rechercher la coordination de la force du corps entier (Zheng). On doit garder la force coordonnée de tout le corps mais en même temps être relâché. Il est très difficile de trouver l’équilibre entre ces deux états. On doit également éviter la tension excessive quand on recherche la coordination de la force du corps entier. La finesse est très importante dans le combat – quand l’adversaire frappe durement vous ne pouvez utiliser que la douceur, finesse pour vaincre sa dureté. Nous appelons ça « vaincre la dureté par la douceur » (Yi Rou Ke Gang) ou « surpasser mille kilos par une méthode intelligente » (Yi Qiao Po Qian Jin). Vous avez besoin de douceur, finesse, pour utiliser ces méthodes.
Js : Que voulez-vous dire par douceur, finesse ?
Ma : Le corps doit exprimer la « force coordonnée totale » (Zheng) tout le temps, être relâché, bouger en spirale.
JS : Que voulez-vous dire « bouger en spirale » ?
MA : Il devrait y avoir des essieux partout sur le corps. Il devrait y avoir des essieux dans les épaules, poignets, coudes, hanches, genoux. Quand vous touchez une partie du corps, il y a un essieu à cet endroit ; quand vous touchez une autre partie, il devrait y avoir un essieu aussi. Le corps ne devrait pas être désordonné. Partout où vous touchez, il y a un essieu là et il bouge en spirale (LuoXuan). La force doit aller en spirale et seulement là cela peut surpasser la force de l’adversaire.
Js : Pouvons-nous utiliser cette « force en spirale » lors d’un combat ?
MA : Si l’adversaire touche n’importe quelle partie de votre corps, alors cette partie devrait exprimer « la force spirale ». Guo GuMin était très célèbre pour sa « paume qui élève » (Tiao Zhang), aussi connu pour sa technique « main de tonnerre » (Zhang Shou Lei). Cela était basé sur la « force spirale » utilisée pour déraciner l’adversaire au contact et ensuite le frapper, ce qui envoyait l’adversaire voler. N’importe quelle technique devrait avoir cette force en spirale.
Js : Quand on marche en cercle, doit-on aussi exprimer cette force spirale ?
Ma : bien sûr que vous le devez. Vous devez marcher comme un poids lourd qui se déplace avec souplesse peu importe l’état de la route, que sa roue soit prise dans un trou ou qu’elle rencontre une pierre. On ne doit pas trop accentuer « agripper le sol avec les doigts de pieds » (Shi Zhi Zhua Di) car cela peut résulter en une force morte (Si Li).
Js : Et à propos de Tang Ni Bu ?
Ma : Il y a un dicton « marche comme si tu frottes le sol, mais tu ne dois pas frotter le sol » (Xing Er Ca Xing Mo Yao Ca). Cela veut dire que vos pieds doivent se déplacer proche du sol, pas trop haut. La deuxième partie de ce dicton « tu ne dois pas frotter le sol » est la plus importante. Vous devez marche comme un singe, les pieds doivent être posés sur le sol très légèrement. Vous ne devez pas frotter le sol avec vos semelles, sinon la force sera dispersée.
Js : J’ai vu des pratiquants qui après avoir fait un pas avec la jambe avant et avant de la pose au sol « jette » leur corps en avant afin que le pied avant aille plus vers l’avant. Est-ce une manière correcte de pratiquer Tang Ni Bu ?
Ma : Non ce n’est pas correct. Vous ne devriez jamais perdre le contrôle de votre centre de gravité, car sinon la force du corps va se disperser.
Js : Leur explication est que cette manière de pratiquer leur permet d’avancer et de couper la distance plus rapidement.
MA : Vous devez utiliser la taille pour diriger votre corps vers l’avant, pour avancer. Le corps devrait être comme une « toupie », avec le centre de gravité bien contrôlé. Le centre de gravité devrait toujours être sur la jambe avant. Vous devez lisser votre fessier et relever l’anus, prendre la même posture que celle quand vous êtes assis sur une chaise, alors la taille conduira vos jambes, le centre de gravité est sur le pied avant, et vous pourrez avancer très rapidement. (M. Ma démontra cette manière de marcher)
Js : Vous êtes connu comme étant un professeur très strict. Avez-vous beaucoup d’élèves ayant atteint un niveau de maîtrise satisfaisant ?
M. Ma : Je pense à deux élèves, ils travaillent tous les deux pour le Bureau de sécurité publique de la municipalité de Pékin. Un d’eux, Chen XiangXian, est le professeur principal là-bas. Il a pris ce poste quand j’ai pris ma retraite en 1993.
Js : Que pensez vous du niveau actuel des pratiquants de BaGua à Pékin ?
M. Ma : Le niveau des pratiquants actuels, professeurs, est bien inférieur à celui des maîtres d’anciennes générations. Et ce même si beaucoup d’entre eux ont publié des livres et deviennent de plus en plus connus.
Js : Quand êtes-vous devenu le président de l’association de recherche de BaGua de Pékin ?
M. Ma : En 1993 quand mon professeur, Li ZiMing est décédé. J’ai repris la position de président de l’association.
Js : Quelles sont les branches de BaGua qui font parties de l’association ?
MA : Toutes les branches pratiquées à Pékin sont représentées dans l’association. Il y a le style Yin Fu, Cheng TingHua, Liang ZhengPu, Fan zhiYong, et Song ChangRong. Le style Song n’a que quelques pratiquants. Nous avons des réunions tous les mois. Lors des élections cette année, j’ai encore été élu président de l’association et Gao JiWu (fils de feu Gao ZiYing), Wen DaSheng (disciple de Fan FengLan), Wang ShanZhi (fils de Wang Fu ; Wang Fu a étudié le style Yin avec le fils de Yin Fu, Yin YuZhang) – vice-présidents ; Jia ShuSen est le secrétaire.
Js : Avez-vous étudié le TaiJiQuan ?
M. Ma : Oui, j’ai appris le TaiJiQuan de mon professeur (Li ZiMing) ; j’ai aussi appris un peu de Gao ZiYing et le fils de Bao Zhang, Han LanYu. Une fois que vous maîtrisez vraiment un art martial alors il est très facile d’apprendre d’autres styles. Apprendre des centaines de techniques et formes est inutile. Nous appelons ça « Une fois qu’Un est maîtrisé tous sont compris » (Yi Tong Bai Tong).
JS : Pensez vous que le TaiJi et le xingYi devrait construire des qualités internes similaires au BaGua ?
M. MA : Oui, tous ces styles devraient mettre l’accent sur le NeiGong.
Js : Et à propos du Shaolin ?
M. Ma : Feu Liu WanCang, pratiquait des styles durs ainsi que le TaiJi ( le style Wu JianQuan ; il enseignait au parc de DiTan) était très avancé en NeiGong. Il était très fort et avait l’habitude de pratiquer avec des boules de pierres lourdes de 40 kg. De plus il y avait aussi plusieurs pratiquants de Shaolin (comme feu Hu LaoDao qui enseignait au parc de TaoRanTing à pékin) qui avaient atteint un haut niveau en NeiGong.
Js : Est-ce que leur force était comme du mercure – ce que vous avez mentionné sur le NeiGong du BaGua ?
M. MA : Non, leur qualité interne n’était pas assez bonne. Bien qu’ils aient atteint un niveau relativement haut de NeiGong, il restait inférieur à celui développé par la pratique correcte que permettent les styles internes. Je ne pense pas que les styles externes puissent atteindre les plus hauts niveaux.
Js : Avez-vous pratiqué des méthodes de renforcement (tels que celle mentionné ci-dessus – les balles de pierres) ?
M. Ma : Non, je n’en ai jamais pratiqué.
Js : Et la grande lance (Da Qiang) ?
M. Ma : Oui, j’ai pratiqué la grande lance. Sa longueur est de un Zhang et deux Chi (environ 4 mètres). J’ai appris les exercices de la grande lance du BaGua de Li ZiMing. Le but étant de construire la force et d’apprendre la méthode de corps (ShenFa) ; ouvrir les articulations, et sortir la force (étirer les tendons de manière dynamique). Cette méthode doit être utilisée pour améliorer ses qualités. Les personnes, qui ne pratiquent pas les arts martiaux, ont des articulations plutôt raides ce qui limite leur marge de mouvements. Par la pratique de la grande lance, l’on peut ouvrir les articulations, augmenter leur souplesse donc améliorer l’agilité de ses mouvements.
Js : Et à propos des autres armes du BaGua ? Quel est le but de la pratique avec des armes en BaGua ?
M. Ma : Chaque Arme a ses caractéristiques et est pratiquée pour atteindre un but spécifique. Prenons comme exemple le sabre du BaGua, il est utilisé pour pratiquer tordre (Ning), envelopper (Guo), perforer (Zuan) et renverser (Fan). Les torsions sont pour la méthode de corps (ShenFa). Le sabre du BaGua est grand, quatre Chi deux Cun (environ 1.2 m) et le principe majeur de sa pratique
est : « vous marchez, bougez, mais le sabre ne bouge pas » (Ren Zou Dao Bu Dong), « ce n’est pas l’homme qui joue avec le sabre mais le sabre qui joue avec l’homme » (Dao Shua Ren Bu Shi Ren Shua Dao). Mon sabre est long et gros et pointe toujours vers l’adversaire donc ce n’est pas facile pour lui d’entrer. Quant il attaque, j’utilise simplement le « renverser » (Fan) et je coupe son bras avec le sabre.
Js : Donc est-ce que vous pratiquez les techniques du sabre ou bien est-ce que vous améliorez votre ShenFa par la pratique du sabre ?
M. Ma : Les deux. Non seulement vous pouvez apprendre comment utiliser, mais le plus important, améliorer vos qualités en BaGua, en particulier les mouvements du corps. Il est dit : « L’homme suit le sabre, le sabre bouge avec l’homme » (Ren Sui Dao Zou, Dao Sui Ren Xing).
Js : Quelles sont les armes les plus importantes en BaGua ?
M. MA : toutes sont très importantes et aucune ne le sont vraiment. Le plus important est le GongFu, la maîtrise. Une fois que vous avez la maîtrise, vous pouvez utiliser n’importe quoi en tant qu’arme. Ce n’est pas utile d’apprendre beaucoup de forme d’armes. Une fois que vous avez le GongFu alors l’apprentissage des armes est très facile.
Js : Et à propos de l’épée ?
M. Ma : Les méthodes du sabre et de l’épée ne sont pas séparées (Dao Jian Bu Fen) bien que l’épée ait une structure différente du sabre.
Js : Quelles sont les particularités de la Lance du BaGua ?
M. Ma : En BaGua nous avons la grande lance et la petite lance. Cette dernière et aussi appelé « serpent à deux tête » (Shuang Tou She) et possède une pointe aux deux extrémités. Sa particularité majeure est d’utiliser une arme longue sur une courte distance (Chang Qiang Duan Yong) et est différente des méthodes typiques de « Lan Na Zha ». En BaGua, vous redirigez la lance de votre adversaire avec une extrémité de votre arme et vous frappez avec l’autre extrémité. Une fois que vous pouvez utiliser le principe d’utiliser une longue arme sur courte distance, alors vous pouvez même utiliser un bâton court contre un sabre. Cela peut être facilement remarqué dans les techniques d’une autre arme typique du BaGua « le bâton des sept étoiles » (Qi Xing Gan), qui est principalement utilisé pour frapper. Lors de l’utilisation d’une arme longue, on doit pouvoir utiliser la « saisit flexible » (Huo Ba) ce qui permet de changer la saisie de l’arme sans perdre le contact avec celui-ci.
Js : Y a-t-il des formes à deux en BaGua Zhang ?
M. Ma : Oui, nous avons plusieurs formes pratiquées avec partenaire. La plus célèbre et la plus précieuse est probablement « les quatre formes combinées du sabre qui fend » (Si Tang Dui Pi Dao). Les autres sont : « forme combinée de l’épée qui fend» (Dui Pi Jian), « Forme combinée des bâtons qui fendent » (Dui Pi Gan), ainsi que les « 72 saisies » (Qi Shi Er Na), « les 72 pieds liés » (Qi Shi Er Jie Tui), « Les huit principales saisies » (Liu Ba Zhong Na), « les 72 techniques » (Qi Shi Er Zhao) et d’autres.
Js : Quelles sont les spécificités du combat libre en BaGua ?
M. Ma : Le combat libre du BaGua diffère des autres styles. La plus importante particularité est que les deux mains avancent vers l’adversaire en même temps. Dans d’autres styles quand une main avance vers l’adversaire, l’autre main recule. En BaGua, il est important de frapper vite et pour cette raison les deux mains vont vers la cible simultanément. Les mains doivent bouger rapidement, les pas doivent aussi être rapide, alors seulement on peut atteindre « l’excellence » (BaGua Wei Qiao). Il y a un dicton : « le changement dans un combat est en face de toi » (Bian Hua Zai Qian Tou) ce qui veut dire que le changement de technique dans un combat et dans la méthode des mains rapides, pas dans le corps entier.
Js : Chaque style de BaGua utilise des formes de paumes différentes …
M. Ma : Oui, le style Cheng utilise « la force des serres de l’aigle » (Ying Zhao Li), le style Yin « l’énergie qui perce » (Yi Qi Guan Tong), le style Liang « paumes comme des rangées de tuiles sur un toit » (Wa Long Zhang, car les doigts sont placés les uns sur les autres comme les tuiles d’un toit). Les disciples de Dong ont reçu un enseignement différent suivant les styles qu’ils avaient appris avant l’étude du BaGua, c’est pourquoi ils ont développé leurs propres styles avec des caractéristiques distinctes. Leurs techniques de mains et méthodes de corps sont différentes. Cependant, ils devraient tous exprimer la « force en spirale » (Luo Xuan Jin). Cela concerne non seulement le NeiJia mais aussi Les styles WaiJia (externe).
Js : Enseignez-vous a vos étudiants de manière différente suivant la structure de leur corps ? Enseignez-vous aux personnes de grandes tailles de manières différentes qu’aux personnes plus petites ?
Mr Ma : Non je leur enseigne de la même manière. même si il est dit que les grands ont des difficultés pour prendre des positions basses, la véritable question est seulement de savoir si ils ont passé assez de temps à pratiquer. Ce n’est pas vrai que le bagua convient mieux aux petits qu’aux grands, ils ont tous leurs avantages, mais ils doivent pratiquer dur pour pouvoir les utiliser.
Js : Combien d’étudiants avez-vous ? Est-ce difficile de devenir votre disciple (Rumen Tudi) ?
M. Ma : J’ai environ 60, 70 disciples. Ils ont dû apprendre avec moi pendant 3 ans minimum avant que je ne les accepte en tant que disciple. Je dois tester la moralité de mes potentiels disciples.
JS : Qu’enseignez-vous ?
M. Ma : Ce que j’enseigne à mes étudiants dépend principalement de leur niveau. Comme je l’ai dit, il n’est pas utile d’apprendre beaucoup de techniques et de formes si vous n’avez pas de bonnes bases. Les premiers trois ans sont très importants car c’est le temps le plus court pour obtenir les bases du NeiGong, la petite circulation céleste peut s’ouvrir. Cependant le haut niveau de maîtrise demande 10 ans pour être atteint. Par haut niveau de maîtrise, je veux dire être capable de bouger et répondre naturellement, sans avoir à prendre de posture ou même penser à utiliser des techniques. Pour atteindre les plus hauts niveaux il faut non seulement pratiquer de manière appliquée, mais aussi être doué.
Js : Que voulez-vous dire par « doué » ?
M. Ma : On doit être intelligent, avoir une grande capacité de compréhension (WuXing ). C’est aussi important que la pratique. On a besoin des deux si l’on veut atteindre le plus haut niveau de maîtrise. On doit être un « bon matériel » pour devenir un vrai artiste martial.
Js : « bon matériel » ?
M. Ma : Comme je l’ai dit avant, on doit être intelligent et modeste, capable de pratiquer dur, avec une bonne moralité. Si quelqu’un est très intelligent mais sournois et rusé, une telle personne n’arrivera jamais loin dans les arts martiaux. On doit être loyal à la pratique, honnête, avec l’intérêt d’apprendre les arts martiaux, la vraie vertu martiale (Wu De). Je n’enseigne pas aux gens intelligent qui ne sont pas honnêtes.
Js : Est-ce que vous enseignez aux enfants ?
M. Ma : très peu. En chine, les enfants étudient très dur à l’école et n’ont pas beaucoup de temps libre.
Js : Quel âge ont vos plus vieux élèves ?
Mr Ma : Les plus vieux qui commencent à apprendre avec moi sont dans leur quarantaine et cinquantaine. Certains d’entre eux pratiquent très bien. Même si leur base de Wuhu, compris comme flexibilité et force de la taille et des jambes, ne peut être comparée à celle des jeunes enfants, mais ils font de grands progrès en NeiGong. C’est absolument suffisant pour être capable de faire bon usage du BaGua dans un combat.
Js : Pensez-vous qu’il soit nécessaire d’apprendre le WaiJia avant de commencer avec le NeiJia ?
M. Ma : Peu importe que vous appreniez le NeiJia ou le WaiJia, vous devez d’abord développer la flexibilité des jambes et de la taille. Une fois que vous avez ces bases, vous pouvez faire de rapides progrès en NeiJia. Donc la pratique du WaiJia, les bases du WuShu, peuvent aider pour votre NeiJia. Bien sûr les bases peuvent être atteintes par la seule pratique du NeiJia, mais cela prend plus de temps. Le WaiJia peut être considéré comme un raccourci dans l’apprentissage des bases. Il y a cependant une différence ; la flexibilité obtenue par la pratique du BaGua vient naturellement avec la pratique et ne peut pas être perdu, alors qu’en WaiJia la flexibilité des jambes est obtenue par des étirements réguliers, une fois que vous arrêtez les étirements votre flexibilité diminue très vite. D’habitude après trois mois sans pratique, la souplesse est perdue. En BaGua une fois que vous pouvez marcher dans la position basse (Xia Pan) la flexibilité des jambes augmente beaucoup.
Quelles sont les caractéristiques du bassin du bas (Xia Pan) ?
M. Ma : La définition est que dans le bassin du bas vos hanches et vos genoux sont au même niveau, comme assis sur une chaise basse. J’avais l’habitude de pratiquer la marche Xia Pan pendant une heure sans repos. Mon fils a pratiqué la marche Xia Pan pendant six ans, deux heures chaque jour, son niveau de Xia Pan est très acceptable. Une fois que la vraie maîtrise – NeiGong – en Xia Pan et atteint, le pratiquant a le sentiment que ses pieds ne touchent pas le sol quand il marche. Nous en avons déjà parlé …
Js : M. Ma, Merci beaucoup pour votre temps et votre générosité d’avoir partagé toutes ces connaissances !